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Un point de vue flamand : « Léon Degrelle et la Légion Wallonie : la collaboration en Belgique francophone »

Oorlogskranten LD.jpgÀ l’occasion de la sortie d’un numéro consacré à Léon Degrelle, nous avons présenté sur ce blog l’entreprise Journaux de Guerre qui diffuse des fac-similés de journaux (essentiellement) publiés sous contrôle allemand entre 1940-1945, et ce, agrémentés de commentaires on ne peut plus « politiquement corrects » émanant du CEGESOMA (18 mars 2016).

 

Il existe une édition flamande (de Oorlogskranten) qui vient de publier à son tour (c’est le n° 37 ; en français, c’était le n° 7) la copie du Pays réel du 1er janvier 1941, en même temps qu’un autre quotidien –Vooruit– publiant la traduction néerlandaise du discours de Léon Degrelle au Palais des Sports de Bruxelles, le 5 janvier de la même année, célébrant l’action révolutionnaire du Führer.

 

L’intérêt de cette publication est que la double page de commentaires censés « encadrer » les dangereux fac-similés, ne reprend absolument pas en traduction les divagations des « experts » cégésomesques, mais propose une contextualisation originale en néerlandais de jeunes historiens flamands réunis en une « association sans but lucratif » Geheugen Collectief – Historisch projectbureau (Collectif Mémoire – Bureau de projet historique).

 

Contrairement au CEGESOMA qui est une organisation de l’Etat fédéral belge appartenant aux Archives de l’Etat, cette organisation privée se veut un « bureau de recherche historique » au service de ses clients, allant même jusqu’à écrire sur son site internet, dans la présentation de sa Vision entrepreneuriale : « Nous recherchons constamment un résultat non seulement qui vous satisfera mais dont vous pourrez également être fier. Grâce à de nombreuses discussions et un échange de réactions suffisant, nous nous assurons que notre produit sera totalement dans la ligne de vos attentes. Le responsable de projet est votre interlocuteur personnel chargé de tout diriger sur la bonne voie. » Dans cette perspective toute commerciale, les chercheurs du bureau sont « des historiens professionnels qui ont fait leurs preuves […] en rendant l’histoire attrayante auprès d’un large public. » Face à une telle publicité, nous nous attendions donc au pire, mais il faut convenir qu’il n’y a pas pire que le CEGESOMA !!!

 

Vous remarquerez immédiatement que l’illustration de couverture ne reprend pas le montage grotesque d’un Léon Degrelle hurlant des « nazisteries » à l’aide d’un porte-voix tenu par un bras détourné d’Adolf Hitler, mais propose un montage métaphorique illustrant parfaitement ce que furent « Léon Degrelle en het Waals Legioen » (Léon Degrelle et la Légion Wallonie) au Front de l’Est : des héros qui se battirent pour l’honneur de leur pays et qui furent reconnus comme tels par leurs pairs allemands. C’est ainsi que l’écusson officiel des Légionnaires (les couleurs nationales sommées du nom « Wallonie ») surplombe la Croix de Fer de première classe –également tricolore– que tant d’entre eux gagnèrent aux terribles et titanesques combats contre les hordes staliniennes sur le Caucase, à Tcherkassy, en Estonie ou en Poméranie. Ne nous faisons néanmoins aucune illusion : l’interprétation que nous venons de faire de cette couverture n’est certainement pas celle des auteurs, car le montage de l’édition française a été adapté à la huitième livraison consacrée à Staf De Clercq sous le titre « Le VNV collabore » !...

Oorlogskranten VNV.jpgCar il ne faut pas s’attendre à un panégyrique de Léon Degrelle et de ses soldats. Du moins n’explique-t-on pas l’engagement du chef de Rex aux côtés des forces d’Ordre Nouveau par la seule folie aveugle… Même si le rédacteur en chef des Journaux de guerre flamands souligne (en évitant bien de jamais donner la parole au principal intéressé) « l’ambition personnelle sans limite » de Léon Degrelle dominant toute idéologie.

Car il est bien évident pour cet historien que seul l’opportunisme guidait le tribun rexiste qui n’était plus qu’un « politicien sans pouvoir » (« les dirigeants allemands regardaient avec méfiance ce Degrelle bruyant et imprévisible »). Pour lui, d’ailleurs, la preuve par excellence que « Degrelle constitue une espèce unique de collaborateur, absolument convaincu du rôle important qu’il va jouer dans la révolution nationale-socialiste européenne » est l’éditorial du Pays réel célébrant le nouvel an de 1941 en saluant l’action politique et sociale du Führer d’un « Heil Hitler » inédit en Belgique : « Pour les Allemands, [Degrelle et Rex] n’étaient pas des partenaires intéressants et pour la plupart des Belges, ils étaient bien trop radicaux. »

Comme si Léon Degrelle avait été seul à considérer l’écroulement des régimes dits « démocratiques » face aux armées du Reich comme l’avènement d’une ère nouvelle !

C’est le roi Léopold III qui donna son feu vert à la presse de collaboration (Robert Poulet qui lança Le Nouveau Journal en témoignera de manière irréfutable) tout comme à la constitution de la Légion Wallonie contre le bolchevisme (l’abbé Fierens y était l’œil et l’oreille de l’évêché et du secrétariat royal).

C’est le président du parti socialiste (Parti Ouvrier Belge), Henri De Man, confident du roi et ami intime de la reine-mère Elisabeth, qui publia son Manifeste saluant la victoire allemande en ces termes : « Pour les classes laborieuses et pour le socialisme, cet effondrement d’un monde décrépit, loin d’être un désastre, est une délivrance. » Et pour être tout à fait clair sur l’attitude à adopter, il précisa : « Mais ne croyez pas qu’il faille résister à l’occupant ; acceptez le fait de sa victoire et essayez plutôt d’en tirer les leçons pour en faire le point de départ d’un nouveau progrès social. »

C’est le ministre des Affaires étrangères Paul-Henri Spaak qui fit des pieds et des mains pour entrer dans les bonnes grâces de l’occupant qui l’envoya promener.

Jam Fuite.jpgC’est le premier ministre Hubert Pierlot lui-même qui, avant de s’enfuir à Londres face aux fins de non-recevoir allemandes, affirma « que nous sommes des vaincus et que nous devons nous adapter à cette situation », envisageant froidement la future Belgique comme « un Zollverein ayant à sa tête un gauleiter » !!!

Pour tout le monde, la victoire du Reich était un fait acquis dont il fallait s’accommoder et tenir compte. D’où l’extrême diversité des manœuvres opportunistes pour essayer d’en tirer avantage, en jouant notamment sur les multiples services allemands qui entretenaient leur « pré carré » en se marchant souvent sur les pieds… Léon Degrelle les a racontées en long et en large, de manière inénarrable –et irréfutée– dans La Cohue de 40

Jam Ouvre la porte.jpgAu milieu de ce qu’il faut bien appeler un « panier de crabes », le seul à garder ferme son engagement politique et sa ligne idéologique est Léon Degrelle. Victime de la répression « démocratique », dès avant le premier coup de feu marquant la résistance belge à l’envahisseur, Léon Degrelle (qui avait vainement sollicité son incorporation dans l’armée de l’air) passa toute la campagne des dix-huit jours dans les geôles et camps français, torturé sadiquement, mais échappant miraculeusement au sort funeste de son compagnon d’incarcération, Joris Van Severen, massacré avec 21 autres innocents à Abbeville. À son retour, il observe les reptations des uns et des autres avant d’accepter de republier son quotidien rexiste. Mais dès alors, il sait que la seule façon d’opérer en Belgique la révolution nationale et sociale pour laquelle il lutte depuis toujours est de manifester la pureté de son idéal en s’impliquant physiquement aux côtés des armées triomphantes du national-socialisme. C’est ainsi que, sans en faire la moindre publicité, il écrit à Adolf Hitler :

« Führer,

Des mois ont passé depuis que je suis revenu des prisons françaises. Et, depuis ces mois-là, j'assiste, inactif, à l'héroïque et magnifique effort de la jeunesse allemande, en train de créer la plus grande épopée de tous les temps. Vous devez comprendre certainement, Führer, ce qui se passe dans mon âme: le sort de mon pays est en suspens; tant que la guerre ne sera pas finie, je me rends parfaitement compte qu'aucune solution ne sera donnée à la Belgique. […] Pendant la durée de la guerre, je ne puis, politiquement, être d'aucune utilité. Laissez-moi donc alors, Führer, mettre à votre disposition, sur les champs de bataille, ma force et ma jeunesse ! Je sais que les étrangers ne peuvent lutter dans vos armées. Mais n'ai-je pas assez souffert, à cause du IIIe Reich, au cours de ma lutte et au fond de dix-neuf cachots successifs, pour que vous ordonniez une exception en ma faveur ? Appelez-moi où vous voulez, à l'aviation, aux Panzerdivisionen, au poste le plus modeste ou le plus ingrat des SS, n'importe où, je serai heureux et fier de mettre ma vie à la disposition de votre idéal. Führer, je suis certain que vous ne me refuserez pas cette joie. Vous vous souviendrez du jeune homme qui, dès 1936, venait à Berlin vous apporter le salut de Rex. […] Vous me permettrez, j'en suis convaincu, de mêler mon effort à l'effort de la jeunesse du IIIe Reich et de m'engager volontairement parmi vos troupes. Je serai infiniment heureux, malgré mon attachement à mon foyer et à mes quatre petits enfants, de connaître le destin militaire de votre jeunesse héroïque. »

On n’est pas opportuniste lorsqu’on offre sa vie pour son idéal et qu’on le prouve dès que l’occasion se présente. La constitution de la Légion Wallonie et l’engagement de Léon Degrelle au Front, dès le déclenchement de l’opération Barbarossa, en est l’irréfutable illustration.

 La moindre des choses lorsqu’on prétend juger l’engagement d’un « collaborateur » serait quand même aussi d’écouter ses raisons (même si cela donne de l’urticaire aux politiciens actuels, héritiers pourtant de Henri De Man ! voir sur ce blog, le 18 janvier 2016) :

« La collaboration à l’intérieur du pays n’était qu’une opération de lent investissement, de grignotage, de luttes d’influences, quotidiennes et harassantes, menées contre d’obscurs sous-fifres. Non seulement ce travail ne donnerait aucun prestige à celui qui s’en chargerait, mais il ne pourrait que le discréditer. Je ne voulais pas tomber dans ce piège. Je cherchais, j’attendais autre chose. Cette autre chose éclata brusquement : ce fut la guerre de 1941 contre les Soviets. L’occasion unique était là, l’occasion de nous imposer au respect du Reich à force de combats, de souffrances et de gloire. […] En 1941, soudainement, l’occasion nous était offerte de devenir les compagnons et les égaux des vainqueurs. Tout dépendrait de notre courage. Nous avions, enfin, la possibilité de conquérir la position de prestige qui permettrait, au jour de la réorganisation de l’Europe, de parler, la tête haute, au nom de nos héros, au nom de nos morts, au nom du peuple qui avait offert ce sang. […] Mais, nous le disons ouvertement –nous l’avons proclamé haut et clair dès le premier jour– nous avons fait, avant tout, ce don de notre jeunesse, pour garantir l’avenir de notre peuple au sein de l’Europe sauvée. » (La Campagne de Russie, pp. 13-14).

 

« Du politicien sans pouvoir au SS décoré » (Hans Boers)

« Capitaine d’un bateau qui coule » (Jonas Raats)

Les rédacteurs-marchands d’histoire sur mesure appliquent évidemment leur charte commerciale et ne manquent pas de répondre aux besoins de leur client en lui emboîtant le pas avec détermination : les titres de leurs articles (repris en tête de ce paragraphe) sont d’ailleurs éloquents.

leon-degrelle-persiste-et-signe.jpgNous nous contenterons de traduire les passages les plus significatifs en leur opposant les explications de Léon Degrelle, issues de l’indispensable Léon Degrelle : persiste et signe. Interviews recueillies pour la télévision française par Jean-Michel Charlier (éd. Jean Picollec, 1985). On dirait vraiment que Léon Degrelle prend la peine de leur répondre, tant il est vrai que leurs raisonnements sont éculés depuis si longtemps : il faut en effet y insister (ce qui est quand même gênant pour qui se prétend « historien ») que la cible de l’Autoportrait d’un fasciste que réalisa Charlier en 1976 leur répond avec quelque… quarante ans d’avance !!!

 

 « Entre-temps [l’absence de Degrelle de la scène politique belge entre le 10 mai et le 30 juillet 1940 pour cause de déportation dans les geôles françaises], ses principaux rivaux pour le pouvoir en Belgique ne sont pas restés assis. Le VNV, par exemple, grandit lentement mais sûrement jusqu’à devenir le partenaire privilégié de l’administration militaire allemande et son leider, Staf De Clercq, se prononce même avant la fin de 1940 pour une extrême collaboration avec l’occupant. » (Hans Boers)

« Au début de la guerre, Rex avait dû regarder depuis le banc de touche comment le VNV était choyé par les Allemands. » (Jonas Raas)

« Les Allemands conservateurs de Bruxelles […] manipulaient les Flamands, leur laissant croire que la Flandre allait tout obtenir, tout posséder, que les Wallons ne comptaient pas, qu’ils seraient jetés dans les ténèbres. […] Non seulement les Flamands avaient décidé tout de suite de s’engager mais ils l’avaient malheureusement fait d’une façon assez maladroite. La maladresse de leur politique m’a désespéré pendant toute la guerre. Ils s’étaient, en juin 1940, jetés trop vite dans les bras des Allemands. Ils avaient reçu des embrassades, mais pas de garanties. Ils se sont lancés de la même façon dans l’aventure du front de l’Est, s’alignant dans les rangs de la Waffen SS sans avoir obtenu la moindre promesse politique, sans que même leur soit reconnu le droit à être commandés dans leur langue et par des hommes de leur peuple. Jusqu’au dernier jour de la guerre, leur commandeur serait un Allemand. Eux qui avaient répété pendant des années leur slogan “in Vlanderen Vlaamsch” admettraient –on ne leur avait même pas demandé leur avis– de laisser tomber en Russie leur vieille langue chargée de civilisation et de n’utiliser que l’allemand pour leur commandement ! » (Charlier, pp. 253, 265-266)

 

 « Le quotidien de Rex, Le Pays réel, sort à nouveau de presse le 25 août, bien plus tard que les autres journaux d’avant-guerre qui avaient décidé de reparaître sous la censure. Degrelle, lui-même journaliste, fait fréquemment parler de lui via le journal. » (Hans Boers)

« Jusqu’à ce moment-là [la rencontre avec le secrétaire du roi Léopold III, le comte Capelle, le 21 août 1940], je n’avais pas bronché. Même mon journal Le Pays réel n’avait pas reparu. A tel point que les Allemands nous avaient confisqué le stock de papier du Pays réel, stock que nous n’avons jamais vu réapparaître par la suite et qui ne nous fut jamais remboursé. Vous voyez combien nous étions comblés de papier par les Allemands ! Ce ne sont pas eux qui nous en fournissaient; ce sont eux, au contraire, qui pillaient le nôtre ! Avant de recevoir les consignes du roi, je n’avais pas rencontré un seul dignitaire allemand en Belgique. Je ne voulais voir personne, ni faire un geste dans le sens d’une quelconque collaboration avant de savoir ce que pensait le chef constitutionnel de mon pays. […] “Allez-y ! reparaissez le plus tôt possible”, avait été la réponse du roi. […] Mais, même encore là, j’étais défiant. Je n’ai pas voulu faire reparaître personnellement notre quotidien; mon nom ne serait plus mentionné en tête du journal qu’en qualité de fondateur. Des collaborateurs orientés par le roi, comme Robert Poulet, me reprochèrent même alors ma prudence ! Je ne tenais plus à être le directeur de mes journaux. Je voulais me réserver. Je n’étais pas encore sûr, suffisamment, de ce qu’on pouvait espérer des Allemands, et tout spécialement de Hitler, muet, drapé dans le mystère de sa victoire. » (Charlier, pp. 235-238)

 

« En janvier 1941, [Degrelle] insista sur la convergence entre la “communauté idéologique rexiste et le national-socialisme” et décrivit sans ambages Hitler comme “l’homme le plus extraordinaire de notre temps”. Rex avait clairement opté pour la collaboration totale. Hélas pour Degrelle, ses flatteries n’eurent pas le moindre effet sur l’occupant allemand. Ce dernier avait en effet davantage confiance dans le VNV qu’en Rex et son chef impulsif. » (Jonas Raas)

léon degrelle,journaux de guerre,oorlogskranten,pays réel,henri de man,rex« J’ai essayé tout juste en janvier 1941, dans un article du Pays réel et à Liège dans un grand meeting, de lancer un “Heil Hitler” dans l’espoir de réveiller l’arbitre de Berchtesgaden. Mais Hitler, à ce moment-là, était déjà en plein dans ses préparatifs de la campagne de Russie. Il avait d’autres chats à fouetter que les chats belges. » (Charlier, p. 252)

 Il n’empêche que, dès son retour des prisons françaises, Léon Degrelle n’était pas resté sur le « banc de touche » et que, dès alors, il avait des discussions décisives avec Henri De Man chez l’ambassadeur allemand en France, Otto Abetz.

« Ainsi, voilà, à la fin d’un dîner diplomatique, une alliance décidée entre la masse ouvrière, appui charnel de la nation, groupée au sein de l’ancien parti socialiste d’Henri de Man, et le Rexisme avec ses cohortes de jeunes garçons à la foi de feu, décidés à transformer moralement et matériellement leur pays. […] J’arrivais ainsi à un résultat exceptionnel: comme je l’avais toujours voulu. J’avais sauté par-dessus les marécages où barbotaient cinquante ou cent candidats-ministres de Bruxelles qui espéraient, tous, sans idéal quelconque, pouvoir se raccrocher au pouvoir allemand, retrouver des places et des fromages. J’avais sauté aussi par-dessus l’administration des hauts fonctionnaires allemands de Bruxelles, insolents et tatillons, des rescapés d’ancien régime, qui pensaient uniquement aux intérêts de l’expansionnisme allemand. […] Le rendez-vous Hitler-Degrelle avait été préparé avec application, comme tout ce que les Allemands préparent. Il devait avoir lieu, en Belgique même, à Brûly-de-Pesche, près d’Yvoir, le 26 octobre 1940. Hitler me recevrait le matin. L’après-midi, il recevrait de Man. Le lendemain, il recevrait Léopold III, pour lui faire part de sa décision, une décision que le roi ne pourrait qu’admettre puisque mon futur coéquipier Henri de Man était le principal de ses collaborateurs politiques. » (Charlier, pp. 246-247)

On sait que l’offensive de Mussolini en Grèce fit capoter ces rencontres et pesa même d’un poids décisif sur le sort de la guerre contre l’URSS.

 

 « Degrelle et Rex demeurent éloignés du pouvoir. Pour les Allemands, ce ne sont pas des partenaires intéressants et pour la plupart des Belges, ils sont bien trop radicaux. De plus, il faut d’abord que la guerre soit terminée avant qu’on puisse réfléchir à l’avenir définitif de la Belgique au sein d’une Europe dominée par l’Allemagne. Jusque-là, le pays restera une base d’opérations pour l’armée allemande et aucun Belge n’aura la moindre chance d’obtenir quelque véritable pouvoir. » (Hans Boers)

Degrelle et Rex trop radicaux ?

« Aux sénateurs belges venus le consulter en juillet 1940, le gouvernement Pierlot-Spaak répondit textuellement : “En ce qui concerne l’avenir de la Belgique, le Gouvernement ne sait pas ce que sera le Traité de Paix. Le plus favorable serait que la Belgique continuât, avec une indépendance relative, englobée dans un Zollverein ayant à sa tête un gauleiter. Encore une fois, le gouvernement vous supplie de bien vouloir vous mettre dans la tête que nous sommes des vaincus, et que nous devons nous adapter à cette situation.” Cette déclaration inouïe d’adaptation volontaire, presque masochiste, à une solution de semi-esclavage –à laquelle Hitler ne pensait même pas !– est du 18 juillet 1940. Elle a été communiquée par le Premier ministre Pierlot au vice-président du Sénat belge, Leyniers. Ce texte est épouvantable. Nul n’oserait en dénier l’authenticité. Un gouvernement, par la voix même de son Premier ministre, faisait savoir officiellement que tout ce que les Belges pouvaient attendre de mieux, ce serait d’être englobés dans un Zollverein, ce qui signifiait : un rattachement douanier au IIIe Reich. Mais cela, sous la domination omnipotente d’un gauleiter, c’est-à-dire d’un représentant dictatorial du IIIe Reich en Belgique. » (Charlier, p. 227)

 La Belgique, une simple base d’opérations pour l’armée allemande ?

« Les Allemands conservateurs de Bruxelles étaient à peu près tous des fonctionnaires qui voulaient prolonger le vieil impérialisme industriel des Allemands de 1914, qui ne pensaient qu’à étendre l’espace territorial allemand et à s’emparer de la vie économique de ces régions riches, bien équipées, aux populations laborieuses, d’un gros rendement. La création de l’Europe n’intéressait pas les généraux à la Falkenhausen. Elle était à leurs yeux une lubie de plus d’un Hitler qu’ils haïssaient. Un accord avec la Haute Finance de la Belgique leur paraissait, par contre, un objectif d’un intérêt extrême. […] Falkenhausen entendait bien […] s’assurer le contrôle complet de la production belge grâce à des autorités complaisantes, non seulement de Bruxelles mais même du pseudo-gouvernement belge de Londres, si incroyable que cela puisse paraître. [Il] a encouragé lui-même, à fond, cet effort de collaboration économique belgo-allemande, à direction hypercapitaliste. […] Si un grand nombre d’industriels belges et de financiers belges étaient revenus de France en Belgique au cours de l’été 1940, au lieu d’aller poursuivre l’effort économique de guerre dans le Royaume-Uni, c’était sur les instructions de Pierlot, Spaak et consorts, et spécialement du ministre De Schrijver qui, par écrit, leur remit des certificats les recommandant aux autorités allemandes. Ces grands capitalistes ont, dès cet instant-là, travaillé à cent pour cent pour les Allemands en Belgique occupée parce que le gouvernement belge de Londres, à l’instar du roi Léopold III, leur avait dit de le faire. Ce cynisme irait jusqu’au point où l’on verrait en 1941 Spaak et Gutt, ministre des Finances, écrire aux plus gros industriels de la Belgique occupée qu’ils approuvaient leur collaboration avec les Allemands, “même s’il s’agissait presque entièrement de productions de guerre”. […] Spaak annota de sa propre main ces documents qui furent confiés à l’important banquier belge Fabry. » (Charlier, pp. 253-255)

 

« Degrelle se rend compte tout d’un coup que les Wallons sont finalement des Germains […]. C’est le contact avec les Allemands qui a amené Degrelle à cette nouvelle opinion que la Wallonie fait finalement partie d’un grand Reich germanique. » (Hans Boers)

« Léon Degrelle s’est prononcé en 1943 pour l’intégration des Belges francophones dans un grand Reich allemand. À ses yeux, les Belges francophones étaient des Germains francisés. » (Veronique Van Humsdkerke)

« Il est vrai que les dirigeants nazis trouvaient Degrelle utile pour leur propagande mais doutaient sérieusement de ses qualités politiques. […] Et même si les Allemands lui avaient vraiment donné le pouvoir, Degrelle n’aurait jamais pu être davantage que le capitaine d’un bateau qui coule. » (Jonas Raats)

« Degrelle se rend compte tout d’un coup » !...

En néerlandais « tout d’un coup » se dit expressivement « plots », ce qui marque on ne peut mieux la soudaineté de l’événement ! Mais peut-on vraiment dire que c’est « plots », aussi soudainement qu’une goutte d’eau s’écrasant sur la sérénité des vérités immuables, que la germanité des Wallons s’est révélée à Léon Degrelle en 1943 ? On peut en effet lire dans son éditorial du Pays réel, dès le 9 août 1941 : « Pour nous, Wallons, Germains de langue française, jaillis de la même race que nos frères du Nord et de l'Est, ce grand rassemblement a des résonances toutes spéciales. C'est le passé de notre peuple qui, inconsciemment, nous appelle... Nous rejoignons spécialement la grande communauté germanique, celle qui nous donna le sang originel. »

 Quant au fond de la question sur la germanité des Wallons :

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« J’ai pris le grand virage pour contrer les Allemands impérialistes: ceux-ci nous traitaient comme de vagues sous-Français; en riposte, j’ai proclamé la germanité des Wallons. […] S’il y a un peuple qui par son sang et par son histoire est germanique, c’est le peuple wallon. […] Les Wallons descendent exclusivement des grandes vagues humaines qui sont arrivées de l’Est, voilà plus de vingt siècles, déjà, avant et pendant la décadence de Rome. Les langues wallonnes ont quantité de mots d’origine germanique. Nos églises, nos places publiques, nos palais officiels, portent partout, depuis mille ans, l’aigle du Saint-Empire romain germanique. L’empereur Charlemagne lui-même, que Hitler appelait: “un des plus grands hommes de l’humanité”, était un Germain de Wallonie, né à Jupille, près de Liège. C’est comme cela ! L’étude des races le prouve. L’Histoire le prouve, le spectacle de la Wallonie le prouve. Et la richesse de sa culture et de ses coutumes. Pour moi, c’étaient donc des réalités visibles, et des souvenirs faciles à évoquer. Mais ne nous y trompons pas, les évoquer était, de ma part, un calcul, une tactique, beaucoup plus qu’une théorie. […] Je me servais de l’argument, véridique en soi, parce qu’il permettait d’assurer à nos revendications une base indiscutable. […] Ne l’oublions pas, nos compatriotes flamands avaient toujours dit: il y a en Belgique deux peuples, le peuple flamand qui est germanique et le peuple wallon qui ne l’est pas. Je voulais, une fois pour toutes, apporter la preuve que nous étions aussi germains les uns que les autres, avec des droits identiques. Plus tard, pour enfoncer davantage le clou, je me permettrais de démontrer aux Allemands, par a plus b, que nous étions encore plus germains que les Flamands ! Et, historiquement, c’est rigoureusement vrai ! La Principauté de Liège, élément essentiel de la Wallonie, a fait partie de l’Empire germanique pendant dix siècles, du Limbourg jusqu’au duché de Bouillon. […] Moi, cette germanité des Wallons ne m’impressionnait pas outre mesure, mais les Allemands étaient baba devant cette découverte. Je ne voulais que cela: qu’on n’envoie pas sans cesse dans nos filets cette rengaine des seuls Flamands impeccablement germaniques. Que, surtout, on ne s’en serve pas pour nous opposer à la moitié des habitants de notre pays, dans le but de nous en séparer ! Du même coup, j’affirmais ainsi les droits non plus de la seule Wallonie, mais de la réalité dite belge. C’est-à-dire la réalité millénaire du Leo Belgicus. […] Ce qu’il y a de certain, c’est qu’il a existé, à travers dix siècles, une magnifique unité des diverses provinces des grands Pays-Bas ! Des Pays-Bas qui comprenaient l’essentiel de la Belgique actuelle, le Grand-Duché du Luxembourg, le Nord de la France et le Sud de la Hollande. Je ne voulais plus m’en tenir à la petite Belgique-croupion qui, depuis 1830, a accolé péniblement des Wallons et des Flamands assez récalcitrants. Je voulais reconstituer, au moins moralement, la merveilleuse unité occidentale, qui avait trouvé son épanouissement lors des grands siècles du Moyen Age et de la Renaissance, sous les ducs de Bourgogne et sous Charles-Quint, aux temps fastueux de Memling et de Rubens, de Roger de la Pasture et de Patenier. […] Mon discours était un discours grand-belgiciste. Il allait bien au-delà des limites où certains Allemands eussent voulu nous enfermer comme des moutons tranquilles. […] Je voulais une Europe où nous serions tous égaux dans le respect des personnalités, comme au front même, une Europe des Patries, non pas des patries aux complexes médiocres, mais des patries qui, avec le temps, peut-être en y mettant des siècles, se souderaient définitivement. Mais à aucun prix des patries charcutées, brusquement et malhabilement. Cette position politique, je l’avais tellement bien acquise que Himmler allait lui accorder son assentiment par écrit. Il correspondait en tout à ce que j’avais exposé. Himmler –d’accord avec Hitler– reconnaissait qu’après la guerre serait créé un grand Etat dit de Bourgogne, qui disposerait de son armée propre, de ses finances propres, de sa diplomatie propre, même de sa monnaie et de ses services postaux et que j’en serais le Premier chancelier. Il établissait même, ce à quoi je n’avais jamais pensé, que nous disposerions d’un large couloir jusqu’à la Méditerranée. » (Charlier, pp. 303-320)

 

 ***

 

Afin d'éclairer les dessins de Jam présentés dans  cet article:

"La Fuite"
De g. à dr. : Hubert Pierlot (1883-1963), Premier ministre catholique ; Camille Gutt(enstein) (1884-1971), financier nommé ministre des Finances ; Paul-Henri Spaak (1899-1972), ministre socialiste des Affaires étrangères ; Frans Van Cauwelaert (1880-1961), président catholique de la Chambre des représentants.

 

"Ouvre-moi ta porte..."
De g. à dr. : Louis Piérard (1886-1951), député socialiste ; général Raoul Van Overstraete (1885-1977), conseiller militaire de Léopold III ; Frans Van Cauwelaert ; Paul-Henri Spaak ; Henry Carton de Wiart (1869-1951), ancien ministre catholique des Affaires sociales ; Charles d'Aspremont Lynden (1888-1967), ministre catholique de l’Agriculture ; Camille Gutt ; Hubert Pierlot.

 

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